Décalé

09 janvier 2006

"Mon dieu... pourquoi ?"... et pourquoi pas

Je viens de finir le dernier livre de l'Abbé Pierre, "Mon Dieu... pourquoi ?". J'avais envie de vous donner mes impressions sur ce livre trop court qui interpelle. Oh, certes l'abbé Pierre nous révèle qu'il a eu des relations sexuelles mais ce n'est pas là le plus intéressant bien au contraire. Ce qui est intéressant, c'est sa position de l'Eglise dans la société. Quelques points me semblent particulièrement intéressant :
  • A propos de l’ordination éventuelle de femmes comme prêtres, l’abbé Pierre écrit: “Le Christ, en tant que seconde personne de la Trinité, n’a ni sexe masculin ni sexe féminin. Jésus, en tant qu’incarnation de cette personne divine, ne pouvait avoir qu’un seul sexe. Compte tenu (...) des mentalités de l’époque, on voit mal comment une femme aurait pu être crédible et susciter l'adhésion d'une foule de disciples (...). Il m’apparaît donc évident que le choix du sexe de Jésus est contingent et ne ressort d’aucune nécessité théologique.” Je trouve que c'est une position intéressante qui mérite réflexion.
  • A propos d'une éventuelle relation entre le Christ et Marie-Madeleine, il écrit : "Je ne vois aucun argument théologique majeur qui interdirait à Jésus, le Verbe incarné, de connaître une expérience sexuelle. Je suis même convaincu que ayant voulu épouser pleinement la nature humaine, il a vécu l'expérience du désir sexuel que tout homme connaît. A-t-il voulu satisfaire ce désir ? Si oui, il l'a nécessairement vécu dans un amour partagé et Marie de Magdala semble avoir été la femme la plus proche de lui hormis sa mère. Mais il a très bien pu aussi ne pas satisfaire ce désir, ce qui ne l'a pas empéché d'être pleinement un homme". Ou comment casser toute l'intrigue du Da Vinci Code en quelques phrases !!! Trêve de plaisanteries, l'Abbé Pierre nous décrit ici comme ailleurs le Christ comme un homme accessible, ce qui n'est pas toujours le discours officiel.
  • A propos du mariage des prêtres. Je vous épargne la citation, mais en gros l'Abbé Pierre dit que rien ne l'interdit dans les Ecritures (d'ailleurs l'apôtre Pierre était marié). D'ailleurs, il semble que ce soit devenu une règle que très tardivement (12ème siècle je crois). Pour l'Abbé Pierre, se pose plus le problème de savoir si l'homme d'Eglise est capable de mener de front sa vie familiale et son ministère. Lui n'aurait pas pu semble-t-il, mais dans d'autres religions (en particulier chez les protestants et les othodoxes), les hommes d'église peuvent se marier. Alors pourquoi pas chez les catholiques.
  • A propos du mariage homosexuel : pour faire court, l'abbé Pierre est pour, mais avec un autre nom (comme au Danemark). Il propose le mot Alliance. Personnellement, en tant que chrétienne, le terme d'Alliance est pour moi connoté à l'ancienne Alliance entre Dieu et le peuple juif (avec Moïse) et entre Dieu et les hommes (au travers le Christ). De plus, dans les préparations au mariage catholique, on fait souvent le rapprochement entre le maiage entre deux individus et l'alliance entre Dieux et son peuple. Ce n'est donc pas sur que les catholiques réac acceptent d'avantage le terme Alliance que mariage. Mais ça ne m'étonnerait pas que l'abbé Pierre est voulu faire ici un joli pied de nez au réac. On pourra toujours leur répondre que juridiquement, lesoncles et tantes de votre femme ou de votre mari sont vos oncles et tantes par alliance. Ce mot a donc un sens plus large que le terme mariage.
  • A propos de l'adoption par les homos sexuels : l'Abbé Pierre n'est ni pour ni contre, il préfère attendre le résultat d'analyse sociologique permettant de préciser si les enfants de couples homosexuels sont plus confrontés ou non à des troubles psychologiques. Je suis la-dessus entièrement d'accord avec lui. Le bonheur et le bien être des enfants avant tout. (Mais bon, dans la mesure où ce n'est pas permis, les enfants de couples homosexuels sont peu nombreux ce qui peut entraîner des troubles chez les enfants et fausser les résultats).
Je vous épargne les parties plus sur la religion chrétienne fort intéressantes néanmoins.

En voulant faire ce post, j'ai un peu parcouru la blogosphère. C'est quand même assez impressionnant comment on rend assez facilement cet homme de 93 ans sénile. Le plus impressionnant reste quand même l'article du Monde du 2 novembre 2005 écrit par Monseigneur Hyppolite Simon (disponible ici pour les abonnés seulement). L'archevêque de Clermont-Ferrand réduit le livre de l'Abbé Pierre à du voyeurisme et du racolage déplorant que le reste du message de l'Abbé Pierre ne soit occulté par ces révélations. Mais c'est lui qui réduit le livre à ce passage de 5 lignes (écrit gros). Je vous épargnerai les détails de cet article qui m'a fait enragé parce qu'il me donne plus l'impression que l'on veut empêcher un homme de donner son avis. Je me contenterai de vous citer ces quelques phrases de l'article : "
Si, (...), on nous avait appris que l'abbé Pierre n'a jamais couché avec personne, cela eût été, en un sens, aussi choquant." Assez marrant sous la plume d'un archevêque.

Pour information, l'abbé Pierre a son blog (encore un signe qu'il évolue avec la société et sait être de son temps) pas très prolixe, mais c'est un début.

2 Commentaires :

  • Le blog de l'abbé Pierre s'arrête le 8 juillet. Il n'est plus très à jour ! Une image de l'église ?

    Par Anonymous Anonyme, à 09 janvier, 2006 18:26  

  • Ce qui ressort de votre recension de ce livre, c'est que l'Abbé Pierre semble avoir un positionnement critique vis à vis de son Eglise et souhaiterait - ce qui est assez banal de nos jours, mais ni chez un prêtre ni chez quelqu'un de son âge - qu'elle "vive avec son temps" : égalité homme / femme, reconnaissance des couples homosexuels, Jésus est un homme comme les autres (besoin de proximité et d'identité). Que cette position soit adoptée par des croyants me paraît légitime. Qu'elle soit adoptée telle qu'elle par quelqu'un qui a du faire (j'imagine) un peu de théologie me paraît plus problématique. Il semble mettre de côté des éléments importants également : l'histoire de l'église, sa théologie... et considérer comme évident que la modernité doit primer. Vivre avec son temps, c'est bien, mais notre temps semble nous priver de beaucoup de nos repères et nous sommes invités tout simplement à penser comme les autres.

    Par Anonymous Anonyme, à 09 janvier, 2006 18:43  

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